Le Yi Jing incarne pour moi l’une des expressions les plus fines de la complémentarité des contraires, figurés par le Yin et le Yang. Le premier correspond à notre capacité à recevoir, à accueillir, à se taire ; le second, à notre propension à dire, à donner, à agir. Autant dire les deux versants qui constituent l’art de l’acteur. Mais le plus efficient est le moment imperceptible de passage de l’un à l’autre, du ni l’un ni l’autre. Un vide agissant qui précède toute manifestation, toute représentation. Un étrange possible que le jeu révèle. Car il s’agit bien de jouer, jouer à croire, à se faire peur, à être un autre, à croire en l’Autre qui n’est autre que soi-même, autrement…
J’utilise aujourd’hui le Yi Jing comme « moteur de recherche » en création et en pédagogie, tant pour sa dimension poétique, philosophique que ludique. Inspiré directement de l’observation des phénomènes de la Nature, il se nourrit d’images et de mouvements qui sont sources infinies d’inspiration. Et la part qu’il laisse au hasard résonne intimement avec le fil invisible qui se déroule dans les créations de la compagnie.

Christophe Guétat